Deux grandes études ne trouvent pas de risque accru de troubles du développement ou d’autisme chez les enfants dont les mères ont consommé du cannabis en début de grossesse
Deux nouvelles études de grande envergure ont été menées pour examiner l’impact potentiel de l’usage prénatal de cannabis sur les retards de développement précoce et les troubles du spectre de l’autisme (TSA) chez les enfants. Les résultats, publiés dans JAMA Network Open, ont révélé qu’il n’y avait aucune preuve indiquant un risque accru de retards de développement jusqu’à l’âge de 5 ans ou d’autisme chez les enfants exposés à cette substance en début de grossesse.
Aucune preuve de retards de développement précoce
La première étude, dirigée par Lyndsay Avalos, PhD, MPH, chercheuse au Kaiser Permanente Division of Research (DOR), est la première du genre à examiner les diagnostics cliniques de divers retards de développement, incluant des troubles du langage, des retards moteurs et des retards globaux chez les enfants jusqu’à 5 ans. « Notre étude sur les retards de développement est la première à examiner des diagnostics cliniques spécifiques de troubles du langage et de la motricité, ainsi que des retards de développement globaux, et ce, jusqu’à l’âge de 5 ans, ce qui est plus long que dans d’autres études similaires », a expliqué le Dr Avalos.
L’analyse portait sur un échantillon de 119 976 couples mère-enfant, patients de Kaiser Permanente Northern California (KPNC), nés entre 2015 et 2019. Pour cette étude, les chercheurs ont recherché dans les dossiers médicaux des diagnostics de troubles du langage, de retards moteurs et de retards de développement globaux. Les mères avaient été dépistées pour la consommation de cannabis par le biais de questionnaires et de tests de toxicologie urinaire au début des soins prénataux, généralement entre 8 et 10 semaines de gestation.
L’étude n’a trouvé aucune augmentation du risque de retards de développement précoce chez les enfants associés à l’usage prénatal de cannabis.
Pas de lien avec le trouble du spectre autistique (TSA)
La deuxième étude, qui s’est concentrée sur le risque de TSA, a inclus 178 948 enfants nés entre 2011 et 2019 de 146 296 patientes du KPNC. Les diagnostics de TSA des enfants ont été obtenus à partir de dossiers médicaux et se basaient sur le dépistage pédiatrique universel de l’autisme pratiqué par le KPNC. La consommation de cannabis des mères avait été évaluée par le biais du dépistage prénatal. Selon cette étude, 3,6 % des enfants ont été diagnostiqués avec un TSA, mais aucune relation n’a été établie entre ce diagnostic et l’usage prénatal de cannabis.
Ces résultats sont cohérents avec une autre étude récente menée par la même équipe de recherche, publiée dans le Journal of Developmental and Behavioral Pediatrics, qui n’a pas non plus trouvé de risque accru de trouble du déficit de l’attention avec ou sans hyperactivité (TDAH) ou de troubles du comportement chez les enfants exposés au cannabis pendant la grossesse.
Des résultats rassurants, mais des précautions restent nécessaires
Bien que les résultats de ces études puissent être rassurants pour les futures mères, les chercheurs insistent sur la nécessité de rester prudents. Kelly Young-Wolff, PhD, MPH, co-auteure principale de l’étude et chercheuse au DOR, a souligné que ces résultats ne remettent pas en cause les preuves antérieures montrant des risques accrus d’effets néfastes pour la mère et le nouveau-né liés à l’usage prénatal de cannabis, tels que la naissance prématurée. Elle a également rappelé que les organisations médicales nationales continuent de recommander d’éviter l’usage de cannabis pendant la grossesse.
Importance de la publication des résultats nuls
L’une des conclusions essentielles de cette recherche est l’importance de publier des résultats nuls, c’est-à-dire lorsque les chercheurs ne trouvent aucune corrélation. Selon le Dr Avalos, la publication de ces résultats permet de rediriger les ressources de santé publique là où elles sont le plus nécessaires. Par exemple, si une association avait été trouvée entre la consommation prénatale de cannabis et l’autisme, des ressources supplémentaires auraient pu être investies dans l’identification précoce des enfants exposés au cannabis in utero. Cependant, en l’absence de risque apparent, ces ressources peuvent être réorientées vers d’autres priorités de santé.
Mise à jour des connaissances et perspectives futures
Ces études sont particulièrement précieuses car elles se basent sur des données plus récentes, qui reflètent mieux la puissance actuelle des produits à base de cannabis consommés aujourd’hui, contrairement aux recherches antérieures souvent basées sur la consommation de cannabis dans les années 1970. « Notre étude fournit des données actualisées qui reflètent plus précisément la réalité de l’usage de cannabis aujourd’hui », a déclaré Kelly Young-Wolff.
Toutefois, les chercheurs insistent sur le besoin de poursuivre les recherches afin d’explorer si la consommation de cannabis plus tard dans la grossesse pourrait être associée à un risque accru de retards de développement ou d’autisme. L’équipe prévoit également de continuer à suivre les enfants au fur et à mesure qu’ils grandissent, afin d’examiner d’autres résultats de santé qui peuvent apparaître plus tard dans l’enfance ou l’adolescence, comme les troubles mentaux, l’usage de substances et les maladies cardiovasculaires.
Conclusion
Les résultats de ces études viennent enrichir le champ de la recherche sur les effets de l’usage prénatal de cannabis. Bien qu’ils n’aient pas identifié de lien avec des troubles du développement ou de l’autisme chez les enfants, les chercheurs continuent de recommander la prudence et l’abstinence de cannabis pendant la grossesse, conformément aux recommandations des organisations médicales nationales. Les recherches futures fourniront des données supplémentaires pour mieux comprendre les effets à long terme de l’exposition prénatale au cannabis.
