En nouvelle Zélande la prohibition a échoué

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En nouvelle Zélande la prohibition a échoué

Si l’objectif est de réduire les dommages causés à la société, une analyse coûts-avantages montre que la prohibition du cannabis a échoué

L’idée d’un référendum sur la loi néo-zélandaise sur le cannabis était déjà urgente en 2015, la prohibition avait échoué et coûtait à la société bien plus que l’herbe elle-même. Comme pour l’alcool, le tabac, la prostitution et les jeux d’argent, la réglementation et non la prohibition, semblait être la meilleure solution. Rien n’a changé à l’approche du référendum sur la légalisation et le contrôle du cannabis, le 17 octobre prochain. Au contraire, les preuves de cinq décennies de guerre contre le cannabis sont encore plus convaincantes.

Premièrement, des dizaines de milliers de vies néo-zélandaises ont été endommagées de manière disproportionnée, non pas par l’utilisation de la weed, mais par sa criminalisation.

Selon les chiffres publiés dans le cadre de la loi sur l’information officielle, entre 1975 et 2019 : 12978 personnes ont passé du temps en prison pour des condamnations liées au cannabis (consommation et/ou trafic). Au cours de la même période, 62777 personnes ont été condamnées à des peines d’intérêt général pour des condamnations liées au cannabis.

Ces statistiques n’ont pas été réparties de manière homogène. Les Māori sont plus susceptibles d’être condamnées pour des accusations liées au cannabis, même si elles représentent des taux de consommation plus élevés.

Chaque condamnation représentait un préjudice réel ou potentiel pour les perspectives d’emploi, la capacité de voyager, l’éducation et d’autres formes d’opportunités sociales.

Malgré la loi, la consommation de cannabis augmente

Deuxièmement, malgré ces sanctions et les millions d’heures passées par la police à faire respecter la loi, la demande reste plus forte que jamais. À l’image des tendances internationales (on estime à 192 millions le nombre de personnes ayant consommé du cannabis en 2018, ce qui en fait la drogue la plus utilisée au monde), le nombre de personnes consommant du cannabis en Nouvelle-Zélande est en augmentation.

Malgré tout le battage médiatique, la propagande et la peur, les recherches suggèrent que la plupart des Néo-Zélandais (prés de 80 % ) nés dans les années 1970 ont consommé du cannabis au moins une fois. Une telle utilisation n’ a pourtant pas fait perdre la tête à la population.

Il ne s’agit pas d’une règle universelle. Pour une minorité (peut-être 4 à 10 % de l’ensemble des usagers), il existe un risque de développer une dépendance qui entrave leur fonctionnement psychologique, social et/ou professionnel. Là encore, les Maoris souffrent de manière disproportionnée dans ce domaine.

Malgré ces risques, dans l’ensemble, les dommages causés par le cannabis sont bien moins importants (tant pour les individus que pour la société en général) que ceux causés par les drogues légales telles que l’alcool et le tabac.

Le marché noir ne fonctionne que pour les criminels

Troisièmement, les criminels ont prospéré grâce à l’illégalité du cannabis. Le prix médian de l’once fluctue entre 350 et 400 dollars. Avec des marges bénéficiaires aussi attrayantes pour un produit illégal, un marché noir est inévitable.

En revanche, la qualité et la sécurité du produit ne sont pas réglementées, le marché n’est pas contrôlé (les enfants deviennent des clients) et aucun impôt n’est prélevé sur les bénéfices. Le taux de criminalité par contagion augmente à mesure que les gangs ou les cartels cherchent à monopoliser les affaires et à étendre leur territoire.

Le référendum propose maintenant le projet de loi sur la législation et le contrôle du cannabis comme solution à ces problèmes. Si ce projet de loi était adopté, la situation actuelle changerait de plusieurs façons importantes :

  • l’accès au cannabis pour les personnes âgées de 20 ans ou plus serait limité à un approvisionnement personnel (deux plantes) ou à l’achat de 14 grammes par jour à un niveau de puissance déterminé
  • la vente se ferait par l’intermédiaire d’établissements agréés vendant des produits de qualité contrôlée provenant de producteurs agréés
  • des avertissements sanitaires standardisés seraient obligatoires
  • la publicité serait strictement contrôlée
  • le cannabis ne peut être consommé dans un lieu public
  • la vente à une personne de moins de 20 ans risquerait quatre ans de prison ou une amende pouvant atteindre 150 000
  • les ventes de cannabis seraient taxées
  • de l’argent serait disponible pour des campagnes d’éducation du public visant à sensibiliser aux dommages potentiels et à promouvoir une utilisation responsable.

Selon certaines estimations, les recettes fiscales potentielles s’élèveraient à 490 millions de dollars néo-zélandais par an. Il existe également des arguments optimistes selon lesquels la criminalité et les dommages liés à la drogue diminueront considérablement, voire seront totalement éliminés. Cependant, ces résultats dépendront du prix et de la qualité du produit, de l’efficacité du contrôle des contrevenants et de la fourniture d’une aide adéquate à ceux qui en ont besoin.

Il n’y a pas de solution parfaite

Alors que les preuves recueillies à l’étranger suggèrent que la légalisation réduit de nombreux crimes périphériques associés à l’approvisionnement illégal de cannabis, cela tend à se retourner contre les types de crimes examinés et la nature du marché noir.

Les conditions en Nouvelle-Zélande peuvent être différentes. Ces mises en garde suggèrent qu’il est trop simpliste de croire que la réglementation du cannabis récréatif conduira à une heureuse utopie en Nouvelle-Zélande. Il y aura toujours du mal et il y aura sans doute des problèmes de démarrage si la nouvelle loi est adoptée.

Mais ce n’est pas la question qui est posée le 17 octobre. Les électeurs doivent répondre à la question suivante : la réglementation offre-t-elle une meilleure voie que la prohibition lorsqu’il s’agit de réduire les risques dans notre société ?

Cinq décennies d’échec laissent à penser que l’une de ces options offre plus d’espoir que l’autre.

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