Israël, entre faille constitutionnel et pragmatisme

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Israël, entre faille constitutionnel et pragmatisme

Un projet de loi faillible sur la dépénalisation du cannabis récréatif est passé en première lecture à la Knesset, alors que le cannabis médical s’impose chez les pharmaciens.

Un projet de loi sur la dépénalisation de la consommation en public et sont passibles de diverses amendes. Sur la première infraction, 1000 shekels (230 euros) et 2000 shekels (460 euros) pour la deuxième infraction. Par la suite, seulement sur la quatrième infraction, les individus peuvent faire l’objet de poursuites pénales. Dans le même temps, des cours se mettent en place pour les pharmaciens autours du cannabis médical.

Une dépénalisation en marche?

Le ministre de la Sécurité publique et des Affaires stratégiques, Gilad Erdan mène ce projet de loi. Il a déclaré qu’Israël veut “réduire les méfaits de la drogue mais éviter autant que possible la stigmatisation des citoyens”.

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Gilad Erdan et la “dépénalisation” du cannabis

La députée Tamar Zandberg (Meretz, parti de gauche) a déclaré que l’adoption du projet de loi marque “une autre étape importante sur la voie de notre victoire”. Elle a ajouté que la loi est “loin d’être parfaite, mais c’est un pied dans la porte sur la voie d’une politique de pleine légalisation”.

 


Des failles constitutionnelles dans cette dépénalisation

Cependant, il existe cinq failles constitutionnelles dans le projet de loi. Hors certaines de ces failles pourraient se retrouver dans le projet de loi en France.

Le projet de loi renferme des lacunes constitutionnelles fondamentales, notamment celles que le procureur général a notées cette semaine et que le ministre a choisi d’ignorer.

L’avocat Dekel Ozer de la “Ale Yarok” (Feuille verte, le parti pro-cannabis israélien) est un expert en droit constitutionnel, et explique ce qu’il en est.

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Le logo du parti pro-cannabis Ale Yarok

Selon le projet de loi actuel présenté par le ministre Gilad Erdan, et si les articles importants ne sont pas amendés, le harcèlement des consommateurs de cannabis en Israël devrait augmenter de dizaines de millions de shekels.

Dans l’État d’Israël, il n’y a pas de «constitution», mais il existe des lois fondamentales qui font office de constitution. En cas de contradiction, les lois fondamentales prévalent sur les lois ordinaires. Il existe également des principes fondamentaux d’égalité devant la loi, le droit à une procédure régulière et à la justice, et le droit d’accès aux tribunaux – qui sont des principes suprêmes et il est douteux qu’ils puissent être annulés même dans le cadre des lois fondamentales.

On ne peut pas condamner le fait de porter atteinte à soi-même

L’usage et la possession de cannabis continueront d’être une infraction grave passible de trois ans d’emprisonnement. Ce fait, en soi, est un défaut constitutionnel. Prenons l’exemple d’une personne qui boit de l’eau de Javel pour se suicider. Le suicide n’est pas une infraction criminelle. Donc, si l’automutilation dans une tentative de mort n’est pas une infraction – comment un acte d’ “automutilation” beaucoup moins dangereux même que l’alcool constituerait-il une infraction criminelle?

Une absence d’amnistie

Les casiers judiciaires passés concernant l’auto-consommation de cannabis ne seront pas annulés. En conséquence, les personnes reconnues coupables de possession de cannabis et qui portent des traces de casier judiciaire pour leur propre usage continueront à en porter la marque.

C’est une discrimination claire entre les citoyens qui ont été pris dans le passé et les citoyens qui seront pris à l’avenir, et constitue donc également un défaut constitutionnel.

Une procédure criminelle d’exception pour le cannabis

La proposition permet la poursuite du harcèlement, des perquisitions et l’entrée dans des foyers sans ordre légal, uniquement sur la base de soupçons d’usage personnel. La propriété de soi d’une personne ne se termine pas avec son corps. Il y a un certain degré d’indépendance et de propriété d’une personne qui accorde l’immunité de harcèlement par le gouvernement à ses vêtements, outils, véhicules et son domicile.

Le droit et la procédure pénale stipulent qu’une fouille et l’accès aux maisons se fait qu’en cas de crime. Par conséquent, la loi ne permet pas la recherche dans les maisons, sauf pour les crimes, ce qui n’est pas le cas du projet de loi.

La création de deux classes de citoyens entre ceux condamnés et ceux dont le casier est vierge

Les conditions qui doivent être remplies afin d’admettre l’infraction et de n’avoir qu’une amende au lieu d’être considéré comme criminel violent l’égalité devant la loi. La proposition stipule que quiconque ne répond pas aux mêmes conditions strictes ne peuvent pas être accessible aux conditions de la nouvelle loi.

En principe, les conditions ne peuvent pas porter atteinte à l’égalité devant la loi. Les conditions fixées feront que ceux ayant déjà un casier à cause du cannabis deviendront des citoyens de seconde classe. Ceci est en fait une double peine pour un crime dont ils sont déjà coupable.

Cela conduit à une loi qui viole l’interdiction de la double peine et le droit à l’égalité devant la loi.

Des amendes sur la dépénalisation disproportionnées

Les amendes prévues dans le projet de loi se composent de montants disproportionnées. Ainsi la loi prévoit des amendes de 1.000 shekels et 2000 shekels pour un usage personnel. Ces montants sont 3 fois supérieurs à ceux que l’on donne lors d’un procès.

Le procureur général Avihai Mandelblit lui-même a jugé que ces sommes étaient très lourdes amendes. Cela élimine le pouvoir discrétionnaire des juges. Il s’agit d’une violation du droit à un accès équitable à la justice.

Le cas israélien, par rapport à l’éventuelle réforme prévu en France est intéressant. Dans les deux cas, l’amende semble l’option retenue. L’exemple de l’état hébreu pourrait éclairer des problématiques identiques dans la législation française.


Une formation sur le cannabis médical pour les pharmaciens israéliens

Le mois prochain, le premier cycle d’un nouveau cours sur le cannabis médical sera ouvert uniquement aux pharmaciens. Cela se déroule dans le cadre des préparatifs pour la transition vers la fourniture de cannabis médical dans les pharmacies. La formation dure environ 40 heures et coûte environ 2 000 shekels (460 euros).

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Après la formation de 80 médecins l’an dernier, la réforme a marqué le pas en raison du gel des exportations. Néanmoins, des dizaines de pharmaciens seront formés dont le travail sera de préparer le cannabis en pharmacie.

Dans le cadre d’un nouveau cours, organisé par l’Union des pharmaciens et géré sur le plan scolaire par le professeur Gil Bar-Sela, les pharmaciens obtiendront une licence officielle pour la distribution de cannabis médicale dans les pharmacies. Une centaine de pharmacies se sont inscrites pour prendre ses cours.

Au Technion, la première classe du nouveau cours ouvre le 30 avril. L’Université hébraïque transférera la deuxième classe (à Tel Aviv), probablement plusieurs semaines plus tard. L’inscription anticipée pour le prochain cours Technion se clôture entre les 18 et 20 mars.

 

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